Fig. & vol.

Figures & Volumes






(Pour voir la série en diaporama, 
cliquer sur l'une des photographies...)






"Dès l'abord, le travail de Yannig Hedel semble mener vers le plus grand dépouillement. Quelquefois j'ai pensé qu'il aboutirait à confondre le ciel et la surface même du papier. Ici, vous verrez les tirages qu'il nomme des "pelles" (un outil pour retourner la terre) : ce sont des rectangles de papier sensible verticalement partagés en deux parties égales par un rai de lumière : ciel à gauche, mur à droite, ou l'inverse. L'oeil hésite entre le vide et le plein. Il semble difficile de mener une vision de la réalité vers davantage de nudité. Et pourtant.
Un soir, en commentant ses tirages, Yannig Hedel prononçait cette phrase : "Comment je me situe dans le paysage photographique", qui m'évoqua les plans d'un espace entre lesquels émergeait son travail. Et, devant un cliché montrant une de ses installations : 54 photographies d'un mur de Lyon accrochés dans un musée allemand, il expliquait : "Dans notre dos, il y a un pilier." Sur le coup, je n'ai pas compris ce qu'il voulait dire : nous faire partager, devant une de ses images, la position dans l'espace qu'il avait occupée au moment de la prise de vue. Ainsi, ai-je pensé, il existe dans le dos du photographe Yannig Hedel quelque chose qui a la faculté de traverser le papier photographique.
Dans une représentation dite objective, l'espace comporte trois dimensions, x, y, z ; dans la philosophie taoïste, on n'en compte seulement deux : yin et yang, terre et ciel, comme dans les tirages de notre photographe. En regardant les volumes abstraits, parallèlépipédiques, qui sont sortis des "pelles" hedeliennes, peut-être penserez-vous à des maquettes d'architecte : immeubles, usines, équipements publics, découpés dans une matière incolore et sans saveur, comme dit le chimiste. Une vision de l'espace neutralisée par son volume même. Elle semble plus conceptuelle encore que les photographies, du fait de l'absence de cette métaphore spirituelle : la lumière. Pourtant, ces volumes émergés de la surface sensible sont sans doute des sortes de sablier - plan vertical à gauche, plan incliné à droite - qui donnent la mesure d'un temps capté sur les grands cadrans solaires de la ville.
Les découpes planes, plus colorées, exposées plus loin, semblent presque riantes, brillantes, en comparaison. Elles ont été imaginées à partir d'un tirage de ciel quasiment pur, sans une molécule nuageuse, simplement limité par le dessin des toitures de la ville. Le voilà, le seul ciel qui aurait envahi le papier sensible, mais il a emprunté une surface plus solide, plus indépendante."

                                              Jean Antonini Lyon 2002




























Le Monolithe (1987)